Lydie-Patricia Ondziet : ” Les femmes et les jeunes filles rurales jouent un rôle essentiel dans l’économie”

Lydie-Patricia Ondziet
Lydie-Patricia Ondziet

Célébrée le 15 octobre par la communauté internationale, la journée internationale de la femme rurale permet la réflexion sur le rôle et l’apport décisif de ces actrices  dans le développement agricole et rural. Notre contributrice, Lydie-Patricia Ondziet, présidente des associations  La Trinité et Renaissance d’Alkebulan  et membre de l’association panafricaine d’Aquitaine et de la plateforme des associations féminines de Développement du Congo, nous livre son analyse sur la question, d’un point de vue de son pays, le Congo.

Dans sa résolution 62/136 du 18 décembre 2007, l’Assemblée générale des Nations-Unies a fait du 15 octobre la journée internationale des paysannes connue depuis 2012, comme « La journée internationale de la femme rurale »

C’est donc dans ce contexte de crise sanitaire que nous connaissons, que le monde s’apprête à célébrer cette journée avec comme thèmes principaux, sur le plan international « Infrastructures durables, accès aux services publics et protection sociale au service de l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles des régions rurales » et sur le plan national « Femmes congolaises engagées dans la production nationale ». Suite à cette pandémie liée à la Covid 19, il apparaît judicieux de relever son impact sur les femmes et les jeunes filles rurales.  D’où la question de savoir  les effets négatifs  de ce virus sur la femme rurale et la sécurité alimentaire.

Cette journée mondiale de la femme rurale a pour premier objectif d’offrir une tribune pour reconnaître les mérites et l’apport considérable des femmes au développement socioéconomique de leur pays ainsi que de mettre en œuvre des actions concrètes en vue d’améliorer les conditions de vie et de travail de ces femmes. Cet objectif sera cette année largement éclipsé par la pandémie de la Covid-19 qui volera la vedette en s’imposant comme l’urgence numéro un dans le monde.

Le monde rural subit lourdement les conséquences de la Covid-19

Jusqu’à la fin 2019, le nombre d’individus vivant dans l’extrême pauvreté dans le monde était en pleine décroissance, on comptait environ un milliard de personnes vivant dans des conditions désastreuses, la majorité vivant en zone rurale. Cette année aurait dû marquer une nouvelle avancée dans la réduction de la pauvreté dans le monde, mais la crise de la Covid-19 a eu l’effet inverse en augmentant de 150 millions d’ici à 2021 le nombre de personnes vivant dans des conditions d’extrême pauvreté. Ces nouveaux pauvres sont désormais urbains.

La propagation rapide du virus ainsi que les mesures qui ont été prises pour le contrer ont profondément perturbé les activités essentielles telles que l’agriculture ou la logistique, menaçant ainsi les moyens d’existence des personnes qui vivent de ces activités. Bien que le monde urbain soit le plus sévèrement touché par la crise sanitaire, les mesures de lutte contre la pandémie créent également des difficultés pour les femmes rurales qui jouent un rôle considérable sur le plan de la sécurité alimentaire de leur foyer, en tant que productrices agricoles, gestionnaires d’exploitation, transformatrices, commerçantes, employées ou cheffes d’entreprise.

Les femmes rurales subissent de plein fouet les effets de la crise sanitaire qui les impactent économiquement et socialement, notamment en ce qui concerne la nutrition, le manque de temps, l’accès aux établissements de santé et services, les violences sexistes et conjugales. La Covid-19 accroit drastiquement la charge qui pèse sur les femmes en raison des fermetures d’écoles, de la surcharge des hôpitaux, de la fragilité des personnes âgées et du support constant qu’elles doivent apporter aux membres de la famille qui sont malades.

Les femmes rurales subissent de plein fouet les effets de la crise sanitaire

Bien que les citadins soient particulièrement affectés et que la situation économique d’un grand nombre se dégrade, les pauvres restent majoritairement ruraux. En effet, sur le plan international, quatre personnes sur cinq vivant sous le seuil de pauvreté résident en milieu rural, tandis que la population rurale ne représente que 48% de la population mondiale. Trois forces convergentes sont à l’origine de cette augmentation de la pauvreté : les conflits armés, le changement climatique auxquels s’ajoute à présent la crise sanitaire de la Covid-19.

Malgré la fragilité connue de leurs systèmes de santé et de politique sanitaire, de nombreux pays africains ont été félicités pour avoir mené une campagne efficace de lutte contre la propagation du coronavirus. Cependant, cette crise sanitaire s’est très rapidement transformée en crise sociale et économique en impactant fortement des secteurs comme l’éducation, l’économie ou encore la sécurité alimentaire dans la région. L’incertitude liée à la crise ainsi que les mesures de prévention et de confinement ont causé de profondes perturbations qui ont eu des effets sociaux néfastes et posé des défis uniques, en particulier aux femmes et filles du continent. Certains des défis menacent d’annuler les gains accumulés en matière d’égalité des sexes et d’autonomie des femmes.

Les femmes et les filles rurales jouent un rôle essentiel et incontournable dans l’économie rurale et l’économie de manière large

Elles constituent une part importante de la main d’œuvre agricole, formelle et informelle en contribuant de manière significative à la production agricole, la gestion des terres et des ressources naturelles tout en renforçant les capacités d’adaptation face aux changements climatiques. Bien que ces femmes se soient mobilisées de manière remarquable durant le confinement, le travail féminin est souvent invisible, non rémunéré avec une charge de travail considérable. Les femmes rurales disposent d’une connaissance accrue de leur écosystème et disposent de connaissances notables sur les plantes cultivées auxquels s’additionnent des connaissances spécifiques sur le maintien du cycle de reproduction des espèces végétales et animales.

Certains des défis menacent d’annuler les gains accumulés en matière d’égalité des sexes et d’autonomie des femmes

Il est important de soutenir le leadership et l’implication des femmes rurales sur le plan politique, en participant à l’élaboration de lois, de stratégies, de politiques et de programmes qui impactent directement leur existence, y compris l’amélioration de la sécurité alimentaire et nutritionnelle. L’émancipation des femmes jouera un rôle important sur notre capacité de réaction face aux changements climatiques, l’adoption de technologies à faible émission de carbone et dans la diffusion de connaissances sur le climat.

Aujourd’hui de nombreuses études s’intéressent à la place de la femme rurale en Afrique

On y trouve des informations sur les disparités liées au genre dans l’accès aux ressources productives ainsi que les contrôles sur les ressources et les opportunités d’autonomisation qui leur sont offertes. Des programmes tels que l’entrepreneuriat rural et féminin (EFR) de l’ONUDI à pour objectif de contribuer à la réduction de la pauvreté par le développement de l’entrepreneuriat en insistant sur le développement rural et l’égalité des sexes. Lorsqu’on sait que le continent africain est aujourd’hui le leader mondial en matière d’entrepreneuriat des femmes, on peut imaginer l’impact que pourrait avoir la réalisation de leur potentiel économique sur la croissance et la prospérité du continent.

Le continent africain est aujourd’hui le leader mondial en matière d’entrepreneuriat des femmes

À travers le Programme détaillé de développement de l’agriculture en Afrique (PDDAA), l’Union africaine encourage le continent à investir dans une agriculture moderne afin d’accroitre la proactivité et la production et ainsi exploiter le potentiel de l’économie bleue/océanique africaine. De nombreuses mesures ont cependant besoin d’être prises pour répondre aux nécessités qu’imposent les changements climatiques et autres changements environnementaux qui présentent un risque pour le développement du secteur agricole.

Tout compte fait, malgré les différentes crises que connaît le monde actuellement, l’Afrique, berceau de l’humanité, apparaît comme une source d’opportunités considérables. Il n’en demeure pas moins que ses différents marchés séduisent principalement les investisseurs aguerris, conscients des risques inhérents aux spécificités du continent.

L’Afrique pourrait-elle devenir le futur hub en matière de private equity ou capital-investissement ? Absolument, si l’on en croit les perspectives d’avenir de ce continent et son évolution depuis quelques années.

Logo de l'association "Renaissance d'Alkebulan", créé par Lydie-Patricia Ondziet
Logo de l’association “Renaissance d’Alkebulan”, créé par Lydie-Patricia Ondziet
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A propos CARMEN FEVILIYE 808 Articles
Juriste d’affaires Ohada / Journaliste-Communicant/ Secrétaire Générale de l'Union de la Presse Francophone - UPF section France